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Que la justice, comme la Révolution, soit magnanime

Fidel CastroLA justice, dit-on, coulait dans ses veines. Enfant, il détestait tout ce qui accentuait les différences, les profondes différences d’une époque qui, avant la Révolution, plaçait les hommes dans deux camps : celui des riches et celui des pauvres. Et cela, dans presque tous les cas, dans l’injustice la plus flagrante, donnait un sens ou non à la vie.

Quelqu’un qui le connut de très près et fut au courant de ses anecdotes, certaines dignes d’être racontées, disait récemment que certaines expériences, y compris depuis son enfance, gravèrent à jamais cet idéal suprême de justice en Fidel : les privations des paysans, les excès de la garde rurale envers la population modeste, la discrimination des Haïtiens ?

Pour Katiuska Blanco Castiñeira, écrivaine, essayiste et journaliste qui détient, parmi tous ses « titres », celui d’écrire sur Fidel, ces expériences de l’enfance ont définitivement marqué son caractère, sa détermination irrévocable de faire valoir la justice, au prix de tout sacrifice.

Ce n’est pas en vain qu’il devint avocat. Et chaque fois qu’il a pu exercer son métier, signalait Katiuska, il le faisait presque toujours pour des honoraires très bas ou même gratuitement, et en se revendiquant de l’éthique et de l’humain.

« Les chemins de la justice, chez Fidel, se réduisaient à l’humain, à l’essentiel : la sensibilité. »

Et la justice, si absente durant ces années-là, il ne l’appliquait pas toujours par des méthodes orthodoxes. Il préférait, en général, la dénonciation publique, une formule qui atteignit son apogée avec sa plaidoirie historique L’Histoire m’acquittera, prononcée lors de son procès à la suite des événements de l’attaque de la caserne Moncada. Avec cette autodéfense, il fut aussi évident, peut-être plus clairement encore, que la justice régnerait à Cuba au triomphe de la Révolution.

Dans sa plaidoirie, il énonça les cinq lois qui seraient proclamées immédiatement, concernant la souveraineté, le droit à la terre, la confiscation des biens des escrocs… L’éducation et la santé, sans distinction pour tous, étaient également prioritaires. Un programme politique ambitieux qui, comme toute son œuvre, plaçait l’être humain au centre de toute démarche, et visait à lui rendre toute la dignité possible.

Pour cette dignité, il y eut un débarquement du yacht Granma, une lutte dans la Sierra, un 1er janvier et une Révolution qui, comme Fidel avait coutume de le dire – ce que Katiuska rappela plus tard –, devait être magnanime, parce que c’est ainsi qu’il considérait que devait être la justice.

IL Y A EU LA RÉVOLUTION ET LA JUSTICE… ET VICE VERSA

Il est probable que des pages entières de journal ne suffiraient pas à rendre compte, même en synthèse serrée, de tout ce que Fidel a dit sur la justice, que ce soit sur des scènes cubaines ou à l’étranger, que ce soit en faveur de Cuba ou du monde, que ce soit pour condamner les guerres ou la faim, car en fait, c’est la même chose.

Il convient cependant de souligner certaines de ses idées de justice qui sont devenues, grâce à lui et à beaucoup d’autres, pendant près de 60 ans, des œuvres humaines tangibles, impérissables, perfectibles… Des œuvres qui sont aujourd’hui des piliers de la justice.

1. « Être cultivé est le seul moyen d’être libre », disait José Marti. Et Fidel, un éternel martinien, transforma les casernes en écoles, lança une campagne d’alphabétisation qui coûta de la sueur et du sang, mais qui fit sortir Cuba de l’ignorance. Former des Hommes de bien était, et reste, une prémisse.

2. Attribuer la terre à ceux qui la travaillaient vraiment et mettre fin aux excès contre toute la population rurale oubliée. Mener à bien la réforme agraire et revendiquer, pour toujours, la paysannerie cubaine.

3. Sauver la vie d’autrui au risque de perdre la sienne. Construire un système de santé avec une couverture

universelle et gratuite ; éliminer des maladies qui sont encore aujourd’hui la cause de la mort de milliers de personnes dans le monde ; atteindre un taux de mortalité infantile de 4,0 pour mille naissances vivantes, lancer des campagnes de vaccination, améliorer toutes les normes sanitaires… Faire de la vie le premier des droits.

4. Apporter la coopération médicale internationale à presque tous les recoins du monde et, une fois sur place, partager le sort des pauvres de la Terre. Ouvrir les portes aux étudiants latino-américains, et à d’autres, pour qu’ils soient formés comme médecins à Cuba. Après le passage d’un ouragan, la survenue d’un tremblement de terre ou le fléau d’une épidémie, sauver, toujours sauver.

5. Combattre, comme l’exprime le concept de Révolution, « pour nos rêves de justice pour Cuba et pour le monde, qui est la base de notre patriotisme, de notre socialisme et de notre internationalisme ». L’indépendance des peuples frères a du sang cubain.

6. Redimensionner les niveaux d’assistance et de sécurité sociale. Aujourd’hui encore, malgré les tensions financières, Cuba continue d’assumer les dépenses qui, dans ce domaine, maintiennent leur tendance à la hausse.

7. Évaluer les progrès de la science et de la technique en tant que bases incontournables du développement.

8. Assurer le plein accès à la culture et à la pratique sportive.

Combattre la discrimination sous toutes ses formes et autonomiser les femmes.

9. Garantir à tous les citoyens l’accès à la justice et le respect de leurs droits.

La liste pourrait peut-être être beaucoup plus longue et plus substantielle. Mais elle esquisse, du moins d’une certaine manière, la matérialisation de l’idéal martinien de Fidel, sa volonté de construire une Révolution « pour les humbles, avec tous et pour le bien de tous », et un État plus intégral de justice et d’équité sociale.

LA NOUVELLE CONSTITUTION ET L’HÉRITAGE DE FIDEL

Je me souviens qu’au moment où tout Cuba était triste et silencieuse, lorsque Cuba pleurait le départ physique de Fidel, j’ai écrit, pour tenter de lui rendre hommage, qu’un pays tout entier serait son monument, un pays qui irait de l’avant.

Et aller de l’avant a été l’objectif de chacune des transformations entreprises, ou de chaque processus important, telle la réforme de la Constitution qui est en cours et d’où émergera un texte plus contemporain, actualisé et nettement martinien et fidéliste. Et au-delà de nous inspirer de ses phrases, il s’agit d’imprégner la lettre et l’esprit de la Constitution de l’héritage de Fidel.

Dès le préambule, il est précisé que, « guidés par les idées et l’exemple de Marti et de Fidel », et « identifiés aux postulats énoncés dans le concept de Révolution », la nouvelle Constitution sera adoptée comme testament politique. En d’autres termes, cela implique « égalité et liberté pleines ».

Le contenu du projet fait sien également les principes de Fidel, qui ne sont autres que de réaffirmer « le caractère socialiste de notre système politique, économique et social et le rôle dirigeant du Parti », ainsi que consigner un large éventail de droits relatifs, par exemple, à la défense, au procès équitable et à la participation populaire.

Le fait que le droit à l’égalité acquière, dans sa conception, une plus grande portée, est également une idée fidéliste. Ainsi, en poursuivant cette analyse, nous pourrions trouver des vases communicants dans chaque paragraphe, parce qu’il n’y aura pas d’œuvre cubaine qui ne s’inspirera pas de son héritage et qui ne lui rendra pas hommage. Chaque ligne qui évoque le bien-être général et qui projette une société avancée porte en elle la marque de l’avocat, du barbu, de l’homme d’État… de l’Homme.

Et une fois proclamée la nouvelle Constitution, il conviendra, conformément aux affirmations du commandant en chef, de l’assumer et de l’appliquer, parce que, pour faire nôtres ses paroles, « la Révolution ne peut pas créer une Constitution, elle ne peut pas créer des institutions, elle ne peut pas créer des principes qui ne se respectent pas ».

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