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Le défi du nouveau coronavirus dans la géopolitique mondiale

reunion mundial covidOutre ses graves conséquences humanitaires sur la planète, la covid-19 aura des conséquences implacables sur le système international. La situation actuelle constitue sans doute le plus grand défi pour la civilisation humaine depuis les deux guerres mondiales. En effet, du fait de ses dimensions et du nombre des acteurs impliqués, cela pourrait être le plus grand défi posé à notre espèce au cours de ces derniers siècles dans l’intérêt de sa propre survie.

La situation que nous vivons à l’heure actuelle n’a aucun précédent dans les 75 années d’existence de l’Organisation des nations unies : elle propage la souffrance humaine, infecte l’économie au niveau mondial, alors que les travailleurs du monde entier pourraient perdre jusqu’à 3,4 billions de dollars de revenus, et met en danger la vie des personnes, selon Antonio Guterres, le Secrétaire général de l’onu. « Notre monde fait face à un ennemi commun. Nous sommes en guerre contre un virus », a-t-il dit.

En effet, cette pandémie peut nuire aux progrès réalisés par la communauté internationale en matière de développement et de réduction de la pauvreté.

Le nouveau coronavirus portera préjudice à la déjà faible économie mondiale et, en même temps, il aura un solde négatif pour les économies nationales. En quelques semaines, ses effets se font déjà sentir : la chute du prix du pétrole la plus élevée depuis 1991 (atteignant 22 dollars par baril selon la référence étasunienne, en plus des prix entre l’Arabie Saoudite et la Russie), un effondrement généralisé des bourses de valeurs avec d’énormes pertes (Wall Street a fermé le 20 mars avec sa pire semaine depuis 2008) et d’énormes préjudices dans les secteurs du transport et du tourisme.
Par ailleurs, la pandémie freinera la mondialisation et augmentera les nationalismes, elle renforcera le rôle des États et la rivalité entre les puissances mondiales. La covid-19 aura bien d’autres séquelles sur l’économie internationale.

LE COÛT FINANCIER

La diminution de la demande en Chine – puissance économique mondiale –, la fermeture des usines et la quarantaine de la population, des décisions prises progressivement par d’autres pays, ont provoqué la baisse des prix des matières premières, l’interruption des chaînes de production, la diminution des flux commerciaux au niveau international, les pertes des revenus et de rentabilité, et de plus grandes difficultés pour respecter les obligations de paiement de la dette.

Dans des déclarations récentes, la Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et la Caraïbe (cepal), Alicia Barcena, a affirmé que l’économie mondiale sera frappée dans plusieurs secteurs, comme les exportations, le tourisme, les fournitures, le prix des produits et les investissements.

Selon des pronostics préliminaires, la covid-19 entraînera une hausse du taux de chômage de 10%, la pauvreté pourrait toucher 220 millions de personnes (le nombre de pauvres dans la région la plus inégale du monde atteignant 35 millions) ; l’activité touristique dans les Caraïbes pourrait chuter de 25% et le Produit intérieur brut régional (pib) une contraction estimée de -1,8%.

Un autre phénomène à tenir en compte en Amérique latine et la Caraïbe, ce sera la crainte d’investir, causée par une « plus grande “aversion au risque” de la part des investisseurs et l’aggravation des conditions financières mondiales », a indiqué la CEPAL.

« Nous avons besoin de tout repenser, l’économie complète. Nous avons besoin d’une nouvelle vision pour nous centrer sur la façon de faire face à ce scénario tellement difficile qui se présentera à nous à l’avenir. »

SOLIDARITÉ CONTRE UNILATÉRALISME DANS LES RELATIONS INTERNATIONALES
Il est clair que face à de tels défis planétaires, la solidarité est le mot d’ordre pour vaincre l’adversité. Dans ce sens, Alina Barcena a souligné : « Aucun pays ne pourra combattre cette pandémie sans la coopération mondiale et régionale. Finalement, ce que nous devons réellement considérer, c’est ce qu’il se passera avec le multilatéralisme. Nous avons besoin d’une meilleure intégration. Nous devons sans aucun doute nous orienter vers une plus grande coordination, et la priorité des politiques se doit d’être comment aborder l’actuelle crise sociale et de santé . »

La réponse face à la Covid-19 pourrait avoir une incidence sur le tableau de l’hégémonie mondiale. Alors que les États-Unis montrent clairement la déficience de leur système de santé et son manque évident de solidarité avec le monde, la Chine prend le leadership pour avoir réussi à contenir la pandémie, et avoir apporté son aide au reste du monde, en offrant fournitures et médecins compétents, signale la politologue Melisa Centurion.

La Chine, qui a rapporté le premier cas de Covid-19, a apporté une réponse rapide et admirable face à la communauté internationale. Au-delà de la prouesse d’avoir construit un hôpital à Wuhan d’une capacité de 1 000 lits en 10 jours, d’avoir décrété la quarantaine des villes les plus touchées pour stopper la propagation du virus ou avoir renforcé la recherche scientifique, après avoir appliqué des mesures effectives, à l’heure actuelle les nouveaux cas ont considérablement diminué dans ce pays. En essence, la Chine a su donner des leçons au monde sur la manière de contenir le nouveau coronavirus.

Au-delà de cet aspect, la Chine a fait preuve d’une solidarité évidente en soutenant et en participant activement à la coopération internationale dans la lutte contre la maladie par le biais du don de 20 millions de dollars à l’Organisation mondiale de la santé (oms), la fourniture de produits médicaux à d’autres pays (un million de masques à la France, ainsi que des vêtements de protection et des gants médicaux ; 1,8 millions de masques à l’Espagne et à l’Italie entre autres pays ; l’échange d’expériences dans la prévention et la contention de la maladie, le soutien à près de 100 pays, ainsi que l’envoi d’équipe de spécialistes dans plusieurs pays, comme l’Italie et l’Iran, à quoi s’ajoutent les dons effectués par les fondations chinoises.

La coopération bilatérale avec d’autres puissantes européennes telles la Russie n’en est pas moins importante. Dans ce dernier cas, à travers des contacts au plus haut niveau, reflet du soutien mutuel et de l’association coopérative stratégique intégrale entre les deux États. D’autres pays comme Cuba ont donné des témoignages de solidarité internationale, en envoyant des brigades médicales dans plusieurs pays, notamment l’Italie, rien moins d’autre que la huitième puissance du monde.

Selon l’ancien président Rafael Correa : « Un jour, nous raconterons à nos enfants que, après des décennies de films et de propagande, à l’heure de la vérité, lorsque l’Humanité a eu besoin d’aide à un moment où les grandes puissances se sont cachées, les médecins cubains sont arrivés sans rien demander en échange. »

Par contre, les États-Unis ont malheureusement tenté de politiser la pandémie et de stigmatiser la Chine et, à ce jour, leur analyse de la situation s’est rarement montrée coopérative et mais plutôt unilatérale et belliciste.

LES SÉQUELLES POUR WASHINGTON

La Covid-19 a non seulement confirmé les déficiences du système de santé étasunien : absence de couverture sanitaire pour des millions de personnes, tarifs élevés, d’où multiplication des contagions dans le pays, mais elle a également confirmé la réaction tardive de l’administration de Donald Trump, qui a sous-estimé la situation et s’est lancée dans un combat pour l’hégémonie planétaire.

Nombreux sont ceux qui ont critiqué le rôle mythique d’« État sauveur » de la communauté internationale, que les États-Unis prétendent jouer, dans le style des films hollywoodiens. Au contraire, ils condamnent énergiquement la Maison-Blanche pour son maintien de mesures coercitives unilatérales contre Cuba, le Venezuela, l’Iran ou la Syrie, lesquelles rendent plus difficiles ou plus cher les achats de médicaments et autres fournitures destinées à lutter contre la maladie. Des mesures qui violent les droits humains et qui se révèlent être un acte de génocide à l’encontre de ces peuples. Si les États-Unis s’obstinaient à maintenir cette position, ils risqueraient de s’isoler encore plus au niveau international.

La covid-19 pourrait frapper durement le système néolibéral, car les citoyens se questionnent sérieusement désormais sur l’efficacité d’un modèle basé sur la privatisation et les coupes sociales. La pandémie a démontré l’importance de disposer d’un système sanitaire solide et de considérer la santé comme un droit humain.

« Il nous faudra demain tirer les leçons du moment que nous traversons, interroger le modèle de développement dans lequel s’est engagé notre monde depuis des décennies et qui dévoile ses failles au grand jour […] Ce que révèle d’ores et déjà cette pandémie, c’est que la santé gratuite sans condition de revenu, de parcours ou de profession, notre Etat-providence ne sont pas des coûts ou des charges mais des biens précieux, des atouts indispensables. […] c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché », a déclaré récemment le président français Emmanuel Macron, alors qu’il avait défendu ardemment les coupes sociales.

De son côté l’effondrement rapide du système de santé a obligé le gouvernement espagnol à intervenir sur le système de santé privé pour faire face au nouveau coronavirus.

En essence, la situation actuelle exige des efforts coordonnés face à la pandémie : ne pas avoir recours au protectionnisme, à l’égoïsme ni à l’unilatéralisme, et agir ensemble comme une civilisation. Ensuite, après avoir vaincu la Covid-19, nous analyserons en profondeur ses conséquences sur l’échiquier géopolitique. Elles seront nombreuses. Comme tout conflit violent, à cette occasion, une guerre contre un virus entraînera des changements dans le système international.

(Source: Granma)

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